• Saint Robert, priez pour nous...

    L'excès d'éloges finit par tuer l'éloge. 

    Dithyrambiques ! De gauche à droite, en passant par le centre, tous évoquent le grand homme. Au point de rendre presque mal-séant d'imaginer le début du commencement d'un bémol à cette grande et belle fraternité devant la mort.

    Celui qui a mené, jusqu'à la victoire, le combat contre la peine capitale serait donc d'une incontestable qualité. C'est oublier, voire occulter, certaines compromissions, certaines contradictions. 

    La plus terrible de ces contradictions aura été celle du soutien indéfectible du grand orateur à son " ami " François Mitterrand malgré des révélations peu ragoûtantes sur le passé du glorieux vainqueur de 1981.

    La scène, avec effets de manche et cris d'orfraies, du célèbre avocat volant au secours de son ami, président de la République, illustre une des plus troubles tartufferies du monde politique : le 16 juillet 1992, le président Mitterrand, porteur de l'humanisme de gauche, se fait conspuer - lors d'une commémoration de la rafle du Vel d'Hiv - par... des Juifs. L'affaire est paradoxale.

    L'audace des trublions provoque l'ire éloquente de l'homme bon : une "sainte colère". Mais une colère et une indignation pour contrer une colère on ne peut plus légitime : colère contre un François Mitterrand ne renonçant pas, publiquement, à son "amitié" pour René Bousquet. René Bousquet, Secrétaire Général à la Police du gouvernement collaborationniste de Vichy. René Bousquet, organisateur de... la rafle du Vel d'Hiv. Faut-il rappeler que le Général Carl Oberg, plus haut responsable des SS en France, a dit à René Bousquet, futur ami d'un futur président socialiste, qu'il avait fait un excellent travail pour l'exécution de cette arrestation massive de Juifs par la police française ? 

    Comment ne pas être dubitatif face à cette incroyable pirouette morale ?

    De confession juive, meurtri par l'arrestation de son père qui mourra dans un camp nazi, Robert Badinter use donc de son grand art, cinquante ans après cette monstruosité, pour protéger son puissant ami des accusations, non dénuées de fondement, d'une certaine forme de complicité.  

    Comment ne pas être oppressé par un malaise profond ?

    Cette défense menée avec brio et ferveur ne peut laisser indifférent. Elle suscite énormément de questions. Des questions longtemps interdites par la doxa socialiste. Des questions fondamentales, d'ailleurs toujours sacrilèges pour beaucoup...

    Voilà bien une particularité de la gauche française : prétendre défendre la veuve et l'orphelin tout en étant proche de ceux qui les martyrisent. 

    Robert Badinter aura été de ces hommes doués et valeureux mais trop aveuglés par leur certitude d'être - définitivement - dans le " bon camp " pour être irréprochablement honnêtes.

    Le talent devient dangereux dès lors qu'il se fourvoie dans des causes troubles. La gauche française n'a jamais admis ses erreurs ou ses errements. Cette gauche qui s'obstine aujourd'hui dans une posture angélico-idéologique devant les grands défis et menaces de notre époque : la mondialisation, l'immigrationnisme, le nihilisme, la déculturation, les prosélytismes et autres communautarismes.

    Monsieur Badinter mérite incontestablement des éloges mais certainement pas dans sa fascination assumée pour le mitterrandisme, doctrine dont on subit les effroyables effets secondaires.

    De grands intellectuels de gauche ont ouvert les yeux sur leurs égarements et leurs utopies. Avec courage, ils ont reconnu leurs naïvetés passées.

    Quel dommage que cette prise de conscience n'ait pas éclairé tous les esprits...

     

     


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